02 41 81 31 54

Degez Kerjean Avocats : propriété intellectuelle, droit du numérique, RGPD, contrats commerciaux et distribution à Angers, Nantes, Rennes, Tours, Bordeaux, Paris - Actualités

L’utilisation de la marque d’un tiers dans les méta-tags d’un site peut constituer un acte de concurrence déloyale

Publié 27 juillet 2016

La protection des marques est parfois mise à rude épreuve dans les méandres de l’Internet (émergence de nombreuses pratiques déloyales voire illégales en matière de réservation de nom de domaine ou de référencement notamment).

Depuis l’arrêt de la Cour de Justice de l’Union Européenne « Google Adwords » de 2010[1], le fait de reprendre une marque dans les méta-tags d’un site ne constitue pas un acte de contrefaçon.

Pas de contrefaçon si la reproduction de la marque est invisible

En effet, les méta-tags sont considérés comme des balises purement techniques, invisibles par les internautes. Par conséquent, la marque qui y est reproduite n’est pas considérée comme contrefaisante, puisqu’elle n’est pas visible par l’internaute.

Cette Jurisprudence a été immédiatement suivie par les juridictions françaises[2]. Notamment, dans un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris, les juges ont estimé que l’usage au titre de méta-tags d’un signe ne pouvait constituer, ni un acte de contrefaçon du fait de l’invisibilité des méta-tags, ni un acte de concurrence déloyale[3].

Plus récemment, ce principe a été rappelé par un jugement du Tribunal de Grande Instance de Paris qui s’est à nouveau appuyé sur le critère de la visibilité de la marque pour définir si l’acte de contrefaçon est caractérisé[4]. D’ailleurs, dans ce jugement, le Tribunal de Grande Instance de Paris a jugé a contrario que la reproduction d’une marque dans l’adresse URL était contrefaisante du fait du caractère visible de l’URL.

Lorsque la reproduction de la marque est visible par l’internaute alors, l’acte de contrefaçon peut être constitué (voir notre article à ce sujet)[5].

La reproduction déloyale et fautive d’une marque dans les méta-tags d’un site tiers

Dans un jugement du 26 février 2016, le Tribunal de Grande Instance de Paris a, une énième fois, rappelé l’absence de contrefaçon lors de la reproduction d’une marque dans les méta-tags d’un site, cependant le tribunal a jugé que cette reproduction pouvait tout à fait constituer un acte de concurrence déloyale.

Dans les faits de l’espèce, la marque litigieuse avait été concédée au défendeur qui l’avait légitimement intégrée dans les méta-tags de son site internet. Néanmoins, postérieurement au terme de la concession de la marque, il avait continué de l’utiliser en la conservant dans les méta-tags de son site, alors qu’il n’avait plus de droit sur celle-ci.

Le tribunal a précisé que la reproduction de la marque dans les méta-tags ne pouvait être considérée comme un usage de la marque dans la vie des affaires, puisque les méta-tags sont invisibles des internautes

Cependant, il a considéré que l’utilisation d’une marque protégée dans  les méta-tags d’un site tiers était « une démarche volontaire et délibérée, qui permet à celui qui en use de bénéficier de la notoriété de celui dont elle utilise l’identification et caractérise un comportement fautif »[6].

Aussi, pour le tribunal ce comportement justifie que l’acte de concurrence déloyale soit caractérisé et qu’une condamnation sur ce chef soit prononcée sur le visa de l’article 1382 du code civil.

En effet, en continuant d’utiliser la marque protégée dans les méta-tags de son site, le défendeur continuait de bénéficier d’un meilleur référencement et d’une meilleure visibilité sur internet grâce à la notoriété de celle-ci. Cette décision semble justifiée dès lors qu’un tiers tire indûment profit d’une marque protégée et sur laquelle il n’a aucun droit.

Une atteinte vraisemblable à la marque protégée

La Jurisprudence semble plus encline à reconnaître l’existence d’une atteinte lors de la reproduction d’une marque protégée dans des méta-tags qu’elle ne l’était auparavant.

D’ailleurs dans deux ordonnances de référé du Tribunal de Grande Instance de Paris, le juge a considéré qu’il existait une atteinte vraisemblable à la marque protégée « Fichet » qui avait été notamment utilisée dans les méta-tags d’un site tiers[7]. Le juge a subséquemment ordonné « l’interdiction de tout usage, notamment à titre de mots clés permettant d’accéder à un lien commercial et à titre de nom de domaine »[8].

 

Pour plus d’information, vous pouvez nous contacter à l’adresse suivante :

avocats@degez-kerjean.fr

 

Olivia BELOUIN, Sylvie DEGEZ

[1] CJUE 23 mars 2010 « Google Adwords », consulté le 15/07/2016, URL : http://curia.europa.eu/juris/liste.jsf?language=fr&num=C-236/08

[2] Cass. Com. 13 juillet 2010, n°06-20.230 « Google France c/ Louis Vuitton Malletier », consulté le 15/07/2016, URL : https://www.courdecassation.fr/publications_26/arrets_publies_2986/chambre_commerciale_financiere_economique_3172/2010_3324/juillet_3606/862_13_17042.html

[3] TGI PARIS, 3ème chambre, 3ème section 29 octobre 2010 « Free c/ Osmozis », consulté le 15/07/2016, URL : http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=3064

[4] TGI PARIS, 3ème chambre 3ème section 29 janvier 2016 « Mr O. S. Un Amour de Tapis SARL c/ WW E-Services France », consulté le /, URL : http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=4886

[5] S. DEGEZ, O. BELOUIN, « Site internet : marque concurrente en mots clefs pas de contrafaçon ; marque concurrente dans l’adresse URL contrefaçon », publié le 23/02/2016, URL : https://www.degez-kerjean.fr/archives/site-internet-marque-concurrente-en-mot-clef-pas-de-contrefacon-marque-concurrente-dans-adresse-url-contrefacon/

[6] TGI PARIS, 3ème xhambre, 3ème section, 26 février 2016, « Sapia c/ Humanis Prévoyance, APGIS », consulté le 15/07/2016, URL : http://www.legalis.net/spip.php?page=jurisprudence-decision&id_article=5044

[7] TGI PARIS, ordonnances de référé, 19 novembre 2015, n°15/59653 et n°15/59650

[8] M.-E. HAAS, « Un an de droit français des noms de domaines et des marques sur internet », Propriété industrielle, revue mensuelle LexisNexis Jurisclasseur, juin 2016